vendredi 30 juin 2023

    Dans sa pièce de théâtre Marat-Sade, Peter Weiss décrit l’ambiance de l’hospice de Charenton, où les internés représentent l’assassinat de Marat sous la direction du marquis de Sade. À la fin de la pièce, les soit-disant fous détournent les paroles du directeur de l’établissement en s’écriant :

    " Charenton Charenton Napoléon Napoléon La Nation La Nation Révolution Révolution Copulation Copulation "

    S’ensuit une pagaille totale où les gardiens battent les internés, et le rideau tombe alors que le marquis de Sade, debout sur une chaise, éclate de rire.
    Qu’en ai-je déduit ? Que les fous ne sont pas plus fous que ceux qui les ont désignés comme tels.  Peut-être même ceux qui suivent à la lettre les normes sociales sont-ils en réalité les plus fous d’entre tous. Et voilà l’histoire de toute révolution : la folie naturelle - trop longtemps refoulée par les normes - finit par jaillir de tous les individus. Des groupes se forment qui finissent par s’entre-tuer au hasard, et lorsque la fumée se dissipe les survivants s’approprient avec avidité les morceaux qui restent. (De tous les mammifères bipèdes, l’homme est assurément le seul qui est complètement fou, et sans l'ombre d'un doute le plus dangereux pour sa propre espèce.)

(2509)



      D'éternel, aucune plume ne peut rien écrire
   Qui n’ait trempé dans la noirceur de la nuit.

(George Chapman)



    Celui qui a conscience de la mort à chaque instant ne peut facilement obéir : il en mourrait.

(2508)

 



    Les brûlantes contradictions de Nietzsche excluent toute possibilité de tirer de ses écrits une philosophie cohérente. Ecce homo est cependant un superbe standard de jazz sous-titré  "Too late swingin’ blues".

(2507)



    Lâchez prise : si elle est là, tombez dans ses bras, et si vous êtes seul, tombez sur le sol - si elle s’écarte, vous tomberez aussi sur le sol, mais tout est préférable à la position verticale. 

(2504)



    Les hommes sont des oiseaux élevés en cage depuis trop longtemps : libérez-les et ils mourront.

(2492)



       autrefois
    malade
    au printemps
    idiot
    sous un chèvrefeuille
    à présent
    
    que s’est-il passé ?

(2487)


    Ma mère disait :
    - Ces imbéciles parlent aux enfants comme s’ils s’adressaient à des débiles. C’est catastrophique. Il faut s’adresser à un enfant comme on parle à un être intelligent.
    Elle avait raison. J’agis de la même manière, et c’est pourquoi certains enfants m’apprécient tant. Ils ne comprennent pas tout à fait ce que je raconte, bien entendu, et c’est très bien : voilà qui les invite à la réflexion. Pourtant, je n’aime pas tellement les enfants, sauf quand ils ont la mononucléose. Une fois guéris, ils auront peut-être appris quelque chose d’important.

(2486)



    L’homme radote. Faisant ses premiers pas, il répète ce qu’il a entendu puis, enhardi, ce qu’il a lu, et pour finir sombre dans la vieillesse en montrant à tous le potage qu’il a maladroitement composé en assemblant de vaines paroles. « Je vais vous expliquer » dit-il, mais tout le monde a déjà compris ses propos : il radote.

(2481)



    Une courte préface doit suffire à réjouir un bon lecteur, lequel se souviendra longtemps de l’excellent livre dont il achève la lecture en le refermant immédiatement.

(2484)



    Ne lisez pas, n’écrivez pas, ne faites rien du tout : pensez simplement aux dégâts que vous évitez.

(2483)



    Le plus sage conserve le feu intérieur et l'homme du commun propage son incendie.

(2482)

 


    Charlie Brown-Monroe Schulz restera comme l’un des artistes les plus importants de notre époque, et de toute époque. Dessinant sans relâche nos incohérences et nos questionnements sans réponses, il nous rend cependant le sourire en nous offrant quelques éclairs d’une tendresse inoubliable - au prix de ses angoisses et de son incessant combat contre la dépression nerveuse.
    Il avait déclaré :
        « Je ne connais pas le sens de la vie. Je ne sais pas pourquoi nous sommes ici. La vie est faite d’angoisses, de peurs et de larmes. Il y a beaucoup de chagrin aussi, et tout cela peut être vraiment sinistre. Je ne compte pas expliquer ce qu’est la vie à un autre. Pour moi, le mystère reste entier. »
    Charles Monroe Schulz ne fait pas la morale. Il ne propose pas de solution et n’indique aucune voie. Il peint la condition humaine et ne tente aucune explication. Il dépasse en profondeur les assommants traités de philosophie.
    Nous portons en nous chacun de ses personnages. Incessamment, il nous rappelle ce simple constat : plongés dans ce monde, nous sommes submergés dès la naissance. 

(2501)

 

 


jeudi 29 juin 2023

    Qui a été comblé peut jouir du manque.

(2506)



    Jour et nuit, heure après heure, nous sommes ballotés tour à tour par des vagues de souffrances et de plaisir. Si l’on cherche à n’éprouver que du plaisir, on cesse d'être vraiment vivant. Alors le plaisir s’évanouit aussi.

(Eiji Yoshikawa)