dimanche 21 juillet 2024

   L'expression « partir en vacances » m’a toujours plongé dans le bonheur. Tout d’abord parce que je conserve d’exécrables souvenirs de mes rares « voyages », et ensuite parce que cette expression me rappelle la couverture d’un album de Reiser. Le dessin, représentant un embouteillage sur une autoroute, est intitulé La Ruée vers rien.
    On m’expliquera qu’il existe bien d’autres façons de voyager, mais à mes yeux rien ne vaut le dépaysement offert à celui qui, allongé sur le sol, regarde le ciel.

(3065)



    Qu’est-ce que la vie ? - Une fureur. Qu’est-ce que la vie ? - Une illusion, une ombre, une fiction, et le plus grand bien est peu de chose, car toute la vie est un songe, et les songes eux-mêmes ne sont que des songes.

(Pedro Calderón de la Barca)

 


    On n'est jamais assez pessimiste. Le mal des faits dépasse toujours le mal des prévisions. Proverbe mis à jour : le diable est toujours plus laid qu'on ne l'imagine.

(Giuseppe Rensi)


samedi 20 juillet 2024

    Qui veut déterminer toutes choses par les lois irritera les vices plutôt qu'il ne les corrigera.

(Baruch Spinoza)

 
Chapitre XXI
 
 Le petit Ludwig se demanda
 
s'il était nécessaire d'ajouter quelque chose


jeudi 18 juillet 2024

    Le dépassement des frontières de la raison, autrement dit la tendance à la folie, semble précisément une propriété constitutive de l'être qui possède la raison.

(Giuseppe Rensi)



    Je n'ai rien contre les mots, rassurez-vous, c'est juste qu'ils nous enferment un peu plus en nous-mêmes alors qu'ils nous avaient promis le contraire.

(Teodor Ceric / Marco Martella)

 


jeudi 11 juillet 2024

    Cas social : homme fortuné et de fort mauvaise humeur, roulant à tombeau ouvert vers le plus élevé des mausolées.

(3086)



mercredi 10 juillet 2024

    Nous vivons dans un monde ambigu, les mots ne veulent rien dire, les idées sont des chèques sans provision, les valeurs sont dépourvues de valeur, les personnes sont impénétrables, les faits un fatras de contradictions, la vérité une chimère et la réalité un phénomène si diffus qu’il est difficile de la distinguer du rêve, de la fantaisie ou de l’hallucination.

(Julio Ramon Ribeyro)


 

mardi 9 juillet 2024

   Plus j'avance en âge, moins je me comprends, moins je m'aperçois, moins je me connais.

(Carl Gustav Jung - Lu chez Marc)

 

 

 


    Se laisser glisser nonchalamment dans le néant, voilà le plus beau des rêves capables de nous tenir en éveil.

(3080)



lundi 8 juillet 2024

    Si les gens lisent, ils subissent en réalité le tourment d’une peine qu’ils se sont eux-mêmes infligée et rien n’est plus ridicule que le sport, cet alibi préféré entre tous pour justifier l’absence complète de signification de l’individu. 

(Thomas Bernhard)

 

 

mardi 2 juillet 2024

   Tout le malheur de l'homme réside dans le fait qu'il ait été obligé de devenir l'humanité ou qu'il l'est devenu trop tard, quand il s'était déjà irréparablement différencié en nations, races, croyances, castes et classes, en riches et en pauvres, en hommes éduqués et en ignorants, en maîtres et en esclaves. Rassemblez de force en un même troupeau des chevaux, des loups, des brebis, des chats, des renards et des biches, des ours et des chèvres ; (...) forcez-les à vivre dans cette mêlée insensée que vous appelez l'Ordre Social et à respecter les mêmes règles de vie ; ce sera un troupeau malheureux, insatisfait, fatalement divisé, où nulle créature ne se sentira chez elle.

(Karel Čapek)



   Une de mes plus grandes joies de l’année 2024 fut d’imaginer la tête des lecteurs du Figaro Magazine découvrant ces quelques mots inscrits dans la rubrique Littérature :
    « Travail, Famille, Patrie : Foutaises. (…) »
    Sous l’article mentionnant la parution de mon opuscule, les commentaires méprisants des abonnés à l’Annonceur Régional constituèrent le couronnement de mon absence de carrière. (Que les deux Frédéric ayant contribué à la réussite de cette mission improbable en soient vivement remerciés.)
    Il ne me restait plus qu’à mourir heureux afin de parachever mon grand œuvre, ce que je fis, mais plus tard.

(3084)



lundi 1 juillet 2024


 


    Réaliser de nombreux documentaires sur ceux qui ont « échoué », et les diffuser de façon régulière dans les médias. Inviter ceux qui ont « réussi » - et reconnaissent la persistance de leur insatisfaction - à partager un moment de discussion à bâtons rompus avec les premiers sur l’inanité de toute ambition - et de l’inanité en général.
    En déduire l’urgence de la suppression du travail obligatoire, l'élimination de l’argent et l’avènement de l’extinction heureuse.
    Laisser un message à l’intention des extra-terrestres :
 
    « NOUS ÉTIONS TOUS DES ABRUTIS. PRENEZ SOIN DES ARBRES ET DES CROCOSMIA LUCIFER. MEILLEURS VŒUX DE NON-INTERVENTION. »

(3083)

 

 

 


    Et tout à coup, on repense à une idiotie embarrassante qu'on a commise vingt ans plus tôt, qui nous donne à nouveau des sueurs froides. Petit à petit, on est confronté à soi-même, cet être étrange, obstiné et détestable; à ses faiblesses, à ses bassesses, à sa mauvaise conduite, ses limites, sa partialité, ses bêtises, ses humiliations et ses souffrances depuis longtemps passées. Toutes les choses gênantes, douloureuses et vexantes qu'on a vécues nous reviennent, comme au premier jour. Rien ne nous est épargné, quand on ne parvient pas à dormir. 

(Karel Čapek)


 

mardi 25 juin 2024

   Le langage dévoile l’impuissance des mots, et le silence ne nous en apprend pas davantage.

(3077)

 

 


jeudi 20 juin 2024

   Je vois le pendule de Schopenhauer comme une balle de caoutchouc suspendue à un élastique, et frappée au hasard par des amateurs de jokari.
    Nous ne maîtrisons rien. L’espoir est la vision rêvée d’une possible échappatoire, mais il n’y a pas d’issue, et nous continuerons d’être secoués jusqu’au bout.

(3076)



dimanche 16 juin 2024

    Les honneurs déshonorent ; le titre dégrade ; la fonction abrutit.

(Gustave Flaubert)



   L'envie du succès, le besoin de réussir quand même, à cause du profit, a tellement démoralisé la littérature, qu'on devient stupide de timidité.

(Gustave Flaubert)



    Hélas ! ai-je pensé, malgré ce grand nom d'Hommes

   Que j'ai honte de nous, débiles que nous sommes !

(Alfred de Vigny)

 



vendredi 7 juin 2024

    (...) le travail doit être maudit, comme l’enseignent les légendes sur le paradis, tandis que la paresse doit être le but essentiel de l’homme. Mais c’est l’inverse qui s’est produit.

(...)

   Le capitalisme et le socialisme ont la même préoccupation : parvenir à la seule vérité de l’état humain, la paresse. C’est cette vérité-là qui se cache au plus profond de l’inconscient mais, qui sait pourquoi, on ne le reconnaît toujours pas, et nulle part il n’existe le moindre système de travail qui ait comme slogan : “La vérité de ton effort est le chemin vers la paresse.”

 (...)

   Le socialisme est porteur de la libération au niveau inconscient, mais lui aussi la calomnie, sans comprendre que c’est la paresse qui l’a engendré. Et ce fils, dans sa folie, la qualifie de mère de tous les vices. Ce n’est pas encore ce fils-là qui supprimera l’anathème, c’est pourquoi, avec ce petit écrit, je veux réduire à néant la calomnie et faire de la paresse non la mère de tous les vices, mais la mère de la perfection.
 

(Kazimir Malevitch)



lundi 3 juin 2024

    La justice humaine est d’ailleurs pour moi ce qu’il y a de plus bouffon au monde ; un homme en jugeant un autre est un spectacle qui me ferait crever de rire s’il ne me faisait pitié, et si je n’étais forcé d’étudier maintenant la série d’absurdités en vertu de quoi il le juge.

(Gustave Flaubert)

 


mardi 28 mai 2024

        Malgré le fonds de l’excellente morale, fruit nécessaire des divins principes enracinés dans mon cœur, j’ai été toute ma vie la victime de mes sens ; je me suis plu à m’égarer, j’ai continuellement vécu dans l’erreur, n’ayant d’autre consolation que celle de savoir que j’y étais. 

(Giacomo Casanova)

 



lundi 27 mai 2024

    Le mécanisme qui crée les riches et les pauvres est le même que celui qui fait tourner les atomes. [...] Un être vivant, une structure sociale, des riches et des pauvres, des pauvres qui veulent imiter les riches, des riches qui veulent épater les pauvres.
    Les pauvres restent à la maison, les riches partent en vacances ; les pauvres partent en vacances, les riches vont sur la Côte d'Azur ; Les pauvres vont sur la Côte d'Azur, les riches vont au Maroc ; les pauvres vont au Maroc, les riches vont au Kenya.
    Demain, les pauvres iront au Kenya alors les riches feront le tour du monde ; les pauvres aussi feront le tour du monde, les riches feront deux fois le tour du monde ; les pauvres aussi, les riches feront quatre fois le tour du monde ; les pauvres aussi, les riches vingt fois ; les pauvres aussi, etc., etc...
    Vous avez vu ? Conclusion : le jour où les riches cesseront d'épater les pauvres, les pauvres d'imiter les riches sera aussi important que le jour où les atomes ne tourneront plus rond...
    ... faut pas désespérer quand même."

(Jean-Marc Reiser)