Sur un mince cristal l’hiver conduit leurs pas
Le précipice est sous la glace
Telle est de nos plaisirs la légère surface
Glissez, mortels, n’appuyez pas.
(Pierre-Charles Roy)
Il y a une sorte de tristesse qui vient du fait de trop savoir, de voir le monde tel qu'il est vraiment. C'est la tristesse de comprendre que la vie n'est pas une grande aventure, mais une série de petits moments insignifiants, que l'amour n'est pas un conte de fées, mais une émotion fragile et passagère, que le bonheur n'est pas un état permanent, mais un aperçu rare et fugace de quelque chose auquel nous ne pourrons jamais nous accrocher.
(Virginia Woolf)
Bois le vin de ta coupe seul, même s'il a le goût de ton sang et de tes larmes, et loue la vie de t'accorder le don de la soif. Car, sans soif, ton cœur n'est que le rivage d'une mer stérile, privée de chant et de marée. Bois ton vin seul et fais-le avec enthousiasme. Lève ta coupe bien haut au-dessus de ta tête, vide-la jusqu'à la lie, à la santé de ceux qui, eux aussi, boivent seuls.
(Khalil Gibran)
Les trois grands défauts des Américains sont l'efficacité, la ponctualité, le souci de l'action et de la réussite. Ces défauts les rendent nerveux, leur volent leur droit à la flânerie, les privent de beaucoup de temps qu'ils pourraient passer dans une délicieuse oisiveté. Le tempo de vie de l'ère industrielle proscrit les flâneries exquises. Pire, il nous impose un temps mesuré par des horloges qui, au bout du compte, transforme en horloge l'homme lui-même.
(Lin Yutang)
Voilà notre état véritable. C’est ce qui nous rend incapables de savoir certainement et d’ignorer absolument. Nous flottons sur un milieu vaste, toujours incertains et flottants, poussés d’un bout vers l’autre. Quelque terme où nous pensions nous attacher et nous affermir, il branle, et nous quitte, et si nous le suivons il échappe à nos prises, il nous glisse et fuit d’une fuite éternelle ; rien ne s’arrête pour nous.
(Blaise Pascal)
La raison pour laquelle j'ai tellement insisté dans mon œuvre sur l'immoral, le méchant, le laid, le cruel est que je voulais que les autres sachent à quel point ils comptent, plus peut-être que ce qui est considéré comme bon (...)
(Henry Miller)
Politiquement, éthiquement et philosophiquement, je suis du côté des animaux. Je pense que l’humanité est collectivement une espèce tarée, sans espoir aucun. Elle est en train de s’autodétruire, ce qui finalement n’a aucune importance, mais elle détruit aussi la totalité du vivant, c’est-à-dire la possibilité d’autre chose. Et ça, c’est impardonnable. J’ai de la tendresse et de la compassion pour tel ou tel mais je considère l’espèce comme une catastrophe. Pour moi, l’humanité est une injure au vivant et livre après livre, j’essaie d’en explorer les limites.
(Patrick Declerck)
L'honnête homme, détrompé de toutes les illusions, est l'homme par excellence. Pour peu qu'il ait de l'esprit, sa société est aimable. Il ne saurait être pédant, ne mettant d'importance à rien. Il est indulgent, parce qu'il se souvient qu'il a eu des illusions, comme ceux qui en sont encore occupés. (...) Il doit être plus gai qu'un autre, parce qu'il est constamment en état d'épigramme contre son prochain. (...) Il brise en riant les faux poids et les fausses mesures qu'on applique aux hommes et aux choses.
(Sébastien-Roch Nicolas de Chamfort)
Ses yeux se voilèrent ; un long bruit, tranquille comme le silence, envahit ses oreilles, il sentit tout son être baigner dans un néant délicieux. Durant une incomparable seconde, tout lui fut harmonie, clarté sereine, parfum, douceur. Puis il cessa d'être.
(Anatole France)