Stimulant. Ça vaut la peine d'écouter l'intégralité de l'entretien ici: https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/les-chemins-de-la-philosophie/heraclite-6844021
J'aime beaucoup l'idée d'un incessant divorce entre le pensée et langage, ce qu'on veut dire et ce qu'on dit, comme si notre perception, déjà limitée, se dégradait encore d'un niveau dans le moyen de sa transmission, voire de sa conservation.
À l'inverse, je reste perplexe quant à l'interprétation d'"On n'entre jamais deux fois dans le même fleuve" (32:15). Je comprends l'idée des rives contraires pressant l'eau, mais en réalité c'est bien le fleuve, son poids, son frottement, qui fait son lit. La crue et l'étiage sont évidemment une question de débit, pas de relâchement ou de resserrement de la terre, chose qui n'a certainement pas échappé non plus aux Anciens. S'il y a tension, c'est donc entre l'eau et la terre, et c'est l'eau qui gagne. Autant dire qu'il me paraît ici bien difficile de prendre la tradition en défaut.
En effet : nous n'y comprenons rien, et ce que nous pensons comprendre, nous n'arrivons pas à le communiquer. La vie est une histoire de fous, et la pensée est impuissante.
Pauvre bipède inachevé !
C'est l'eau qui qui gagne, dites-vous ? Pourriez-vous nous expliquer cette affaire lors de votre prochain entre-deux-siestes ?
S'il y a tension, ce n'est pas par pression sur les côtés comme lorsqu'on veut faire sortir le dentifrice du tube, mais entre l'eau qui s'écoule et le sol qui la freine et l'absorbe. Or, s'il y a fleuve, c'est que l'eau a gagné, nécessairement. Au niveau du langage, quand je dis "On n'entre jamais deux fois dans le même fleuve", je dis en fait "On n'entre jamais deux fois dans l'eau que rien n'arrête". D'où la tradition me paraît ici limpide, contrairement à l'interprétation de l'ami Heinz. En espérant n'avoir pas obscurci la confusion, je ferme ma vieille bécane retombée en marche et m'en retourne voir si on peut s'immerger deux fois dans le même silence:
un paravent en papier, un oreiller en pierre, un lit rectangulaire en bambou mes mains lasses laissent tomber le livre, long rêve de sieste au réveil, seul je souris de joie plusieurs notes de flûte, un pêcheur au milieu des vagues immenses (Tsai Kuo)
Stimulant. Ça vaut la peine d'écouter l'intégralité de l'entretien ici:
RépondreSupprimerhttps://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/les-chemins-de-la-philosophie/heraclite-6844021
J'aime beaucoup l'idée d'un incessant divorce entre le pensée et langage, ce qu'on veut dire et ce qu'on dit, comme si notre perception, déjà limitée, se dégradait encore d'un niveau dans le moyen de sa transmission, voire de sa conservation.
À l'inverse, je reste perplexe quant à l'interprétation d'"On n'entre jamais deux fois dans le même fleuve" (32:15). Je comprends l'idée des rives contraires pressant l'eau, mais en réalité c'est bien le fleuve, son poids, son frottement, qui fait son lit. La crue et l'étiage sont évidemment une question de débit, pas de relâchement ou de resserrement de la terre, chose qui n'a certainement pas échappé non plus aux Anciens. S'il y a tension, c'est donc entre l'eau et la terre, et c'est l'eau qui gagne. Autant dire qu'il me paraît ici bien difficile de prendre la tradition en défaut.
En effet : nous n'y comprenons rien, et ce que nous pensons comprendre, nous n'arrivons pas à le communiquer. La vie est une histoire de fous, et la pensée est impuissante.
RépondreSupprimerPauvre bipède inachevé !
C'est l'eau qui qui gagne, dites-vous ? Pourriez-vous nous expliquer cette affaire lors de votre prochain entre-deux-siestes ?
Pour ma part, il suffit.
Au lit.
S'il y a tension, ce n'est pas par pression sur les côtés comme lorsqu'on veut faire sortir le dentifrice du tube, mais entre l'eau qui s'écoule et le sol qui la freine et l'absorbe. Or, s'il y a fleuve, c'est que l'eau a gagné, nécessairement. Au niveau du langage, quand je dis "On n'entre jamais deux fois dans le même fleuve", je dis en fait "On n'entre jamais deux fois dans l'eau que rien n'arrête". D'où la tradition me paraît ici limpide, contrairement à l'interprétation de l'ami Heinz. En espérant n'avoir pas obscurci la confusion, je ferme ma vieille bécane retombée en marche et m'en retourne voir si on peut s'immerger deux fois dans le même silence:
Supprimerun paravent en papier, un oreiller en pierre, un lit rectangulaire en
bambou
mes mains lasses laissent tomber le livre, long rêve de sieste
au réveil, seul je souris de joie
plusieurs notes de flûte, un pêcheur au milieu des vagues immenses
(Tsai Kuo)
Je vais y réfléchir dès que la nuit viendra.
RépondreSupprimerEt merci pour les très beaux fragments de poésie que vous nous offrez, cher Hop.